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Pratiques obscures dans notre enseignement supérieur (2ème partie)Date de publication : 02-07-2012 ![]() En ce début de vacances scolaires, le Conseil Supérieur des Musulmans de Belgique tient à féliciter tous les étudiants et étudiantes ayant réussi leur année d’étude en première session et à apporter tout soutien à ceux et à celles pour qui le succès a été postposé, pour une raison ou une autre, à la seconde session. A ces derniers notamment, nous souhaitons beaucoup de courage afin de relever le défi, durant cette seconde chance. Dans la première partie de notre article, nous avions soulevé le problème des souffrances qu’endurent les étudiantes musulmanes durant leurs études supérieures. Faisant, désormais, partie de la vie sociale et politique de notre pays, la chasse à la femme au foulard n’est plus un crime punissable, plutôt n’est plus un crime. Pourrions-nous dire que cette activité devient la caution de toute aspiration à une promotion quelconque. Le cas concret de Soumaya, cette étudiante en architecture dans l’un des instituts liégeois, aujourd’hui intégré à la faculté d’architecture de l’Université de Liège, a été évoqué. Malgré d’excellentes études et un parcours sans faute depuis sa première année primaire jusqu’à sa 3ème année supérieur universitaire, cette étudiante a été rattrapée par la discrimination que notre pays s’est habitué, honteusement, à réserver à ses ressortissants de religion musulmane et surtout aux filles et aux femmes portant le foulard. Deux années avant de boucler son parcours universitaire avec l’obtention de son diplôme d’architecture, une décision prise en urgence de mettre fin à son parcours. Tout montre que la décision a été prise à un haut niveau afin que l’étudiante, non seulement n’obtienne pas son diplôme d’architecte, mais qu’elle n’obtienne même pas son diplôme de Bachelier qu’elle devait avoir en fin de 3ème année. Si la décision paraît avoir été prise par le directeur même de l’institut, également l’un des professeurs de l’année de l’obtention du grade de bachelier, en collaboration éventuelle avec certains de ses collègues, dès sa rencontre de l’étudiante en 3ème année, le scandale n’a vraiment éclaté que lorsque le sabotage est devenu agressif et l’impatience de se débarrasser de l’étudiante avait éclaté au grand jour durant le premier quadrimestre de l’année suivante alors que l’étudiante était doublante. Le conflit ouvert dans lequel s’était engouffré le professeur du « projet d’architecture », le principal cours de la formation, avec un poids de 18 crédits sur 60 (pratiquement le tiers des points), est devenu sans appel. Son effet a été immédiat avec le sabotage de l’étudiante, dès la session de décembre 2009. En effet, avec un 3/10, l’échec en juin était devenu inéluctable. C’est à ce moment-là que, sentant la scolarité de sa fille en danger, le père entre en jeu et dépose une plainte pour discrimination auprès du ministre de l’enseignement supérieur : ![]() avec une copie du courrier à différentes institutions susceptibles d’apporter une contribution dans la résolution du problème, parmi lesquelles :
De toutes ces institutions, aucune réponse probante n’était ressortie. Toutes, sauf la direction de l’institut impliqué dans le contentieux, s’étaient disculpées en se déclarant d’une manière ou d’une autre incompétente dans le traitement du dossier. Quant à la réponse du Recteur, rapportée par son porte-parole, elle a été la suivante :
Ce ne sera qu'Ă la date de cette intĂ©gration que les Ă©tudiants rĂ©gulièrement inscrits en architecture pour l'annĂ©e acadĂ©mique en cours, seront rĂ©putĂ©s inscrits Ă l'universitĂ© (article 2 du dĂ©cret du 30 avril 2009). Selon les dernières informations en notre possession, cette intĂ©gration devrait se rĂ©aliser pour la rentrĂ©e acadĂ©mique 2010-2011. A l'heure actuelle, Monsieur le Recteur n'a, par consĂ©quent, aucun titre pour s'immiscer dans les dossiers de l'Institut ………. et examiner le dossier de votre fille. » Quant Ă celle du centre pour l’égalitĂ© des chances, elle notifiait ce qui suit : « Il y a bien sĂ»r lieu Ă Ă©claircir certains comportements et ne doutons pas que les services du Ministre compĂ©tent vont mener une enquĂŞte. En ce qui concerne votre affirmation que le comportement du professeur en question a une motivation raciste, il vous faut absolument l’étayer. L’origine Ă©trangère de votre fille ne suffit pas pour porter une accusation aussi grave. Nous comprenons très bien le dĂ©sarroi dans lequel vous vous trouvez par rapport Ă la tournure que prend le cursus de votre fille, qui s’est investie dans ses Ă©tudes. Mais si telle est votre conviction que le traitement que subit votre fille est du Ă son origine nationale, il y a lieu de l’argumenter par des Ă©lĂ©ments concrets, que notre Centre est prĂŞt Ă examiner avec toute l’attention requise. » Finalement, la rĂ©ponse du ministre, aussi dĂ©cevante que les prĂ©cĂ©dentes : ![]() Cette rĂ©ponse est quelque peu surprenante. Comment pourrions-nous comprendre cette fuite de responsabilitĂ© devant un problème si grave ? Le ministre ne devait-il pas garantir le droit aux Ă©tudes Ă tous les citoyens sans discrimination ? En tout cas, cette prise de position du ministre socialiste contraste avec celle de son confrère CDh de l’enseignement fondamental et secondaire qui lui n’a pas hĂ©sitĂ© sur les moyens pour enquĂŞter sur l’accusation de ce prof de religion islamique de favoriser les filles portant le foulard aux dĂ©pends de celles qui ne le portaient pas, une accusation non fondĂ©e, basĂ©e sur aucune plainte d’élèves ni de leurs parents, dĂ©mentie par les rĂ©sultats des dĂ©libĂ©rations de fin d’annĂ©e, mais dont les media de notre pays avaient fait leurs choux gras, Ă la fin de l’annĂ©e dernière. Quant Ă Monsieur le Directeur, confiant du soutien dont il bĂ©nĂ©ficiait auprès de ses employeurs et de sa formation politique, il n’avait fait preuve de recherche d’aucune solution. A chaque rencontre avec lui, il ne faisait que rĂ©pĂ©ter : « vous avez Ă©crit au ministre, attendons la rĂ©ponse du ministre! » Comme pour dire que cela ne servait Ă rien et que c’était lui le vrai patron. Pire encore, en tentant de trouver un groupe (pour le cours de projet d’architecture) qui pourrait accepter Soumaya en son sein, lui permettant d’échapper au professeur incriminĂ©, l’un des professeurs se propose pour accueillir l’étudiante dans son groupe, le directeur lui ordonne : « vous, vous devez rester Ă l’écart du problème ! Ne vous mĂŞlez pas !» Ensuite, c’est l’étudiante qui propose au directeur de se joindre Ă ce groupe, mais celui-ci refuse catĂ©goriquement et lui propose un autre, patronnĂ© par l’un des copains du professeur du cours de « projets d’architecture » incriminĂ© ; ce que l’étudiante a refusĂ©, voyant par lĂ une manĹ“uvre du directeur. Ainsi, elle s’était vue contrainte de terminer l’annĂ©e dans ces conditions, tout en sachant qu’il n’y avait plus d’espoir. A la fin de l’annĂ©e acadĂ©mique, Soumaya a Ă©tĂ© dĂ©libĂ©rĂ©e avec un ajournement au seul cours de « projets d’architecture », avec une moyenne de 8.2/20, du essentiellement au 3/10 du mois de dĂ©cembre. Une procĂ©dure de recours auprès du Conseil d’Etat, contre la dĂ©libĂ©ration, avait Ă©tĂ© entamĂ©e, mais les lourdeurs de la procĂ©dure judiciaire l’avaient transformĂ©e en une procĂ©dure en rĂ©fĂ©rĂ© auprès du Tribunal de Liège. Celle-ci n’avait fait que compliquer l’affaire. Cette procĂ©dure fera l’objet d’un article ultĂ©rieur. Le Tribunal avait bien compris la gravitĂ© de l’affaire, mais il avait fait preuve d’incompĂ©tence lĂ©gale de faire plus qu’imposer Ă l’institut une redĂ©libĂ©ration. Cette dernière n’avait eu lieu qu’un mois plus tard, alors que les cours avaient dĂ©jĂ atteint leur rythme de croisière depuis plusieurs semaines. Le directeur ne voyait aucune urgence en cela. Durant l’attente de la nouvelle redĂ©libĂ©ration, un nouveau courrier est adressĂ© Ă Monsieur le Ministre, ![]() le seul capable de rĂ©soudre le problème par la dĂ©signation, par exemple, d’une commission d’enquĂŞte, Ă l’image de ce qui avait Ă©tĂ© entrepris par sa collègue de l’enseignement secondaire, ou par toute autre initiative ; mais paraĂ®t-il il n’y avait de volontĂ© pour cela. Le ministre rejetait la balle dans le camp du centre de l’égalitĂ© des chances et ce dernier comptait sur le ministre. Ainsi, personne n’est responsable ! D’ailleurs, aucune rĂ©ponse n’avait Ă©tĂ© rĂ©servĂ©e Ă ce courrier. L’étudiante triple l’annĂ©e, avec des dispenses dans la plupart des cours, mais elle ne rĂ©ussit pas non plus. Sur proposition de l’avocat qui suit le dossier, une demande avait Ă©tĂ© introduite, le 21 novembre 2011, auprès du ministre lors de l’une de ses permanences pour lui demander une autorisation spĂ©ciale afin qu’elle puisse se rĂ©inscrire dans une autre universitĂ© ![]() Un accusĂ© de rĂ©ception, avec une rĂ©ponse vague, rĂ©digĂ© le 8 dĂ©cembre 2011, ![]() a Ă©tĂ© envoyĂ© Ă l’étudiante et depuis plus rien. Un rappel a Ă©tĂ© envoyĂ© au ministre en fin mai 2012, Ă ce jour aucune rĂ©ponse. VoilĂ le combat de David contre Goliath que mènent beaucoup de nos Ă©tudiantes durant leurs Ă©tudes supĂ©rieures et qui les contraint en fin de course Ă tout abandonner et Ă se convertir en femme au foyer, non par manque de motivation ni par manque de compĂ©tences ni par manque de combativitĂ© mais par excès d’injustice Ă leur Ă©gard, injustice qui va en s’amplifiant et qui par effet collatĂ©ral fait des victimes tous azimuts. Quelle analyse pourrions-nous faire de cette affaire, et quelles leçons pourrions-nous en tirer ? Devrions-nous croire au simple concours de circonstances malheureuses qui choisissent leurs cibles parmi les citoyens les plus fragiles ou plutĂ´t Ă une politique planifiĂ©e, du moins de la part de certaines personnalitĂ©s et formations politiques ? La notion de citoyennetĂ© qui prescrit des droits et des obligations Ă©quitables pour chacun, est-elle vue d’une manière uniforme pour toute la population de notre pays ? La montĂ©e de l’intolĂ©rance de tous bords, des discours haineux Ă l’égard de ceux qui sont diffĂ©rents, de la stigmatisation systĂ©matique de certaines communautĂ©s, des prĂ©jugĂ©s aveugles vĂ©hiculĂ©s, entre autres, par nos media, en ce vingt et unième siècle, dans la zone la plus dĂ©mocratique du monde et des dĂ©bats sans fin sur l’identitĂ© nationale est en train de faire rĂ©gresser notre sociĂ©tĂ© tant Ă©conomiquement que socialement. Finalement, allons-nous sombrer dans les guerres de religions que nous pensions rĂ©volues Ă jamais ? L’avenir nous le dira. Affaire Ă suivre ! A tous et Ă toutes, bonnes vacances ! A suivre Auteur : Mohammed Said Ne soyez pas passif, réagissez ŕ cet article, en ajoutant votre commentaire Copyright © CSMB 2010 |